28 septembre, journée internationale pour le droit à l’avortement : n’oublions pas les élèves !

Le 16 octobre 2024, la Commission des affaires sociales du Sénat publiait un rapport mettant en lumière les conditions d’accès à l’IVG en France. Qu’en est-il pour les élèves ? Nous avons souhaité mettre en lumière le regard de trois collègues sur le sujet. Nous les remercions.

L’engagement de la CFDT pour les droits des femmes est historique.  Ainsi, son combat pour le droit à la contraception et à l’avortement depuis les années 1970 se poursuit encore aujourd’hui ; la CFDT a pesé pour sa récente constitutionnalisation. Selon une alerte lancée par le Planning Familial dans une tribune du Monde en juin 2025, le nombre d’IVG a sensiblement augmenté ces dernières années, tandis que le financement des structures qui défendent et permettent l’accès à la contraception et à l’IVG a baissé.  Les questionnements autour de l’IVG parviennent bien entendu jusque dans les établissements scolaires et il nous a semblé intéressant de poser la question de l’effectivité du droit d’accès à l’IVG pour les élèves aux professionnels de l’Éducation Nationale. 

Nos collègues, infirmiers et infirmières scolaires, entre autres, défendent très concrètement ce droit pour les élèves, et nous avons souhaité mettre en lumière leur regard sur le sujet à l’occasion de la journée internationale pour le droit à l’avortement du 28 septembre. 

Un recours à la contraception d’urgence et aux IVG plutôt rare en collège

Les élèves de collège ont rarement recours à l’IVG. On comprend mieux pourquoi lorsque l’on sait que l’âge du 1er rapport hétérosexuel avec pénétration a lieu aux alentours de 17 ans en moyenne, ce qui met les professionnel·les qui travaillent dans les collèges face à des réalités très concrètes. La délivrance d’une contraception d’urgence, en 1er lieu, est un événement rare, de l’ordre d’une à deux situations par an. Dans les lycées, c’est un peu différent, les élèves étant plus âgé·es. Il faut dès lors gérer par exemple la date de péremption du médicament, ce qui conduit nos collègues à travailler leur réseau. Plutôt que d’avoir le médicament dans une armoire en permanence, des infirmiers et infirmières se mettent en lien avec les pharmacies et les centre de santé sexuelle pour en disposer immédiatement dès qu’un besoin est identifié. 

La nécessité absolue de l’EVAR(S)

La délivrance de cette contraception d’urgence ne doit cependant pas se faire de manière isolée ; préventif et curatif doivent se compléter. On se souvient en effet que la loi du 4 juillet 2001 instaure la possibilité de délivrer la contraception d’urgence, dite « pilule du lendemain », dans les établissements scolaires de France. Et c’est à partir de cette même loi qu’a été rédigée la circulaire de 2003 qui imposait en théorie trois séances d’éducation à la sexualité, maintenant appelée EVAR pour le 1er degré et EVARS pour le 2d degré, par an et par niveau. Il a été démontré que cette circulaire de 2003 a été peu mise en application, notamment par manque de moyens humains et de formation. 

Un nouveau programme d’EVAR(S) soutenu par la CFDT rentre d’ailleurs en application cette année. Il est censé être mis en œuvre dans tous les établissements scolaires de France. Il n’y est pas uniquement question, pour nos collègues des infirmeries, de « seulement » délivrer la contraception d’urgence, ou de faire le lien avec les centres qui pratiquent l’IVG. L’information sur le droit des élèves à accéder à l’IVG en toute sécurité et à une contraception de qualité doit être largement envisagée dans les séances d’EVARS. Le fait que l’infirmier ou l’infirmière soit tenue au secret doit également être relayé régulièrement pour sécuriser la relation avec les élèves. Sans cela, la peur que leur situation soit éventée peut entraver les démarches des élèves pour accéder de manière effective à la contraception et l’IVG.

Les fausses informations qui circulent (sur les contraceptifs hormonaux par exemple) ou les préjugés (liés par exemple aux religions, ou aux stéréotypes) doivent pouvoir être discutés sans jugement ni tabou avec les élèves. 

Des démarches qui se font dans un maillage territorial 

Cette nécessité d’un suivi rigoureux place également les personnels des infirmeries en position de travailler avec les centres de santé sexuelle qui sont eux en mesure de recevoir les élèves plusieurs fois (entretien avec un·e psychologue, un·e médecin, un ou une conseillère conjugale). En fonction de la taille du territoire où elles et ils exercent, ces précieux relais n’existent pas toujours, ce qui peut fragiliser le recours effectif à l’IVG. Les territoires ultra-marins, insulaires, très ruraux ou montagnards sont à cet égard plus fragiles, et leurs particularités mettent parfois nos collègues en tension pour faire appliquer la loi. Il faut faire connaître les structures et les professionnels·les qui peuvent aider à la réalisation d’une IVG, ainsi que le caractère gratuit et anonyme des démarches. 

Un travail d’équipe

Les textes qui encadrent l’IVG pour les élèves peuvent parfois être ambigus quant à la responsabilité qui est engagée. Ainsi, tout·e adulte peut accompagner un·e élève pour sortir de l’établissement scolaire et bénéficier d’une IVG. Mais c’est bien le ou la cheffe d’établissement qui reste responsable de l’élève. Ainsi, une direction peut être mise en cause pour entrave à l’IVG si elle refuse de laisser sortir un·e élève pourtant mineur·e pour cette raison. Mais en même temps, l’adulte accompagnant (qui est souvent l’infirmier ou l’infirmière, mais pas seulement) reste responsable aussi de l’élève pendant le trajet. Un imbroglio qui peut avoir des conséquences très concrètes et demande un dialogue serein dans l’équipe autour de la question de la réalité de l’IVG. Il est donc tout à fait nécessaire que ces réalités existent dans les formations initiales de tous les personnels qui encadrent des élèves. 

Le 28 septembre, défendons l’accès à l’IVG !

La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques agit pour que l’accès à la contraception et l’IVG soit effectif dans tous les territoires et que les personnels qui travaillent au quotidien avec des élèves puissent les accompagner au mieux. Cela a des conséquences très concrètes : formation initiale, liens avec le territoire, financement, capacités de transports. Les professionnel·les de l’Éducation Nationale ont besoin d’être formé·es et d’avoir les moyens d’accompagner les élèves pour faire respecter leurs droits. Ainsi, on pourra bien écrire que l’accès à l’IVG est une réalité effective partout en France, ce qui pour le moment ne peut pas être affirmé sereinement.