« La confiance, c'est ce qui caractérise les sociétés qui vont bien… Les écoles qui vont bien sont des écoles de la confiance. »
Une politique de rupture et de standardisation
Le ministre de l’éducation nationale déclarait le 30 septembre 2017, « en arrivant j’ai dit que je ne ferai pas une nouvelle loi, j’ai dit aussi que je ne changerai pas abruptement les programmes parce que je pense qu’il doit y avoir une sagesse dans la continuité des ministres de l’Education nationale… La solution ne viendra pas d’une loi miracle, la solution ne viendra pas d’une baguette magique, elle viendra d’un ensemble de mesures et d’un climat qu’on aura su créer. »
« La confiance, c’est ce qui caractérise les sociétés qui vont bien… Les écoles qui vont bien sont des écoles de la confiance. »
Est-ce vraiment ce qui caractérise le ministère de M. Blanquer, l’absence de changement brutal et la confiance qu’il a de ses cadres et de ses enseignants ?
Pour le changement, le ministre est partout en même temps dans tous les médias, animé d’une frénésie de déclarations qui déroulent ses innombrables mesures successives qui doivent changer l’école, en rupture et non en continuité avec ses prédécesseurs comme il l’affirmait.
Pour la confiance, nous sommes entrés dans une politique de pilotage par les standards. Il ne s’agit pas de faire confiance aux professionnels que nous sommes pour prendre des décisions et construire des politiques locales en fonction des situations auxquelles nous sommes confrontés, il est question de modélisations (s’appuyant souvent sur la science, notamment la recherche médicale) : les enseignants se voient prescrire des actes professionnels et les corps d’encadrement sont chargés de leur mise en œuvre et de leur vérification.
Les enseignants deviennent des techniciens, des opérateurs pour les personnels de direction, des contrôleurs de process pour les corps d’inspection.
C’est le règne de la diffusion de notes de service, de guides, de mémentos, de vade-mecum, de brochures…
Nous attendions de la stabilité et de l’autonomie ainsi que nous l’avait annoncé le ministre, nous sommes submergés par les prescriptions et le déni de notre professionnalité. Il semblerait que la première qualité attendue d’un cadre pour notre ministre soit l’obéissance et non l’initiative.
Ce n’est pas de pragmatisme politique dont il est question mais d’idéologie politique. La politique des standards, la culture de la dépendance et de la conformité remplace notre culture professionnelle d’autonomie, d’analyse, de sens critique, d’enthousiasme et de créativité.
Le ministre a décidé d’avancer en communiquant essentiellement par l’intermédiaire des médias, sans prendre le temps de la concertation, en ne laissant pas de place à l’initiative du terrain.
Listons maintenant les exemples les plus saillants des décisions ministérielles avec lesquelles nous avons été le plus souvent en opposition, au contraire des autres organisations représentant les personnels de direction.
DNB. Une simplification soi-disant… La seule bonne mesure était sa suppression pour donner sens à la validation du socle à la fin de la scolarité obligatoire… Sur ce point, le Sgen-CFDT et le Snpden partageaient la même position, seul le Sgen-CFDT l’a exprimé au ministre…
Le retour du redoublement. On ne change pas grand-chose pourrait-on se dire par fatalisme ou par lassitude. Si, un élève pourrait redoubler 3 fois entre le CP et la classe de 3ème. Des commissions d’appel ont été instituées à tous les niveaux de classes du collège sans se préoccuper de l’existence de cycles d’apprentissages. C’est le message donnée à l’opinion publique qui est privilégié, une école sérieuse qui fait redoubler ceux qui ne travaillent pas… Qu’importe que toutes les études internationales prouvent que le redoublement n’est jamais la réponse adaptée à la difficulté scolaire.
Devoirs faits. Quelle belle annonce pour le grand public ! Les élèves peuvent faire leurs devoirs au collège sans se poser la question du travail scolaire. Oubliant que l’accompagnement éducatif fonctionnait dans de nombreux collèges, que seulement 20% des collégiens sont concernés… On ne part pas des besoins des élèves et de l’implication des enseignants, on pense au sommet de la pyramide et on dit localement appliquer les bonnes décisions pour de bonnes pratiques.
Réforme du Bac et du lycée : une belle ambition partagée de simplification, de prise en compte du contrôle continu, de préparation à l’enseignement supérieur. Au bout du compte, une organisation complexe et considérablement alourdie qui va transformer l’année scolaire en une succession d’examens que les personnels de direction vont devoir organiser.
Le Sgen-CFDT a été la seule organisation syndicale représentant les personnels de direction qui a exprimé son opposition à une organisation qui va considérablement augmenter les charges de travail administratifs des proviseur.e.s et proviseur..e.s-adjoint..e.s.
Le projet de Bac modulaire porté le Sgen-CFDT, proposé également par Terra Nova et repris en partie par le rapport Mathiot, a été écarté par le ministère, laissant la porte ouverte à la re-création des anciennes séries générales supprimées. Le bac technologique est lui contraint, sans réflexion, de se caler dans l’organisation du bac général sans prendre en compte ses spécificités d’examen contrôle des connaissances fondés sur le projet réalisé par les élèves.
On pourrait ajouter que la proposition de note de service relative aux enseignement de spécialité au lycée pour laquelle les organisations syndicales représentant les personnels de direction ont été consultées ne nous convient pas: les combinaisons de spécialités seraient arrêtées par l’autorité académique et non par l’établissement et les élèves devraient arrêter leurs choix au 2nd trimestre de 2nde et de 1ère, ce qui pour la 2nde , nécessiterait de prononcer des passages en voie technologique ou générale dès le 2nd trimestre.
Parcoursup. Le Sgen-CFDT a soutenu la loi Orientation et Réussite Etudiant parce que de nouveaux droits sont ouverts (régime général de sécurité sociale, contribution vie étudiante, césure possible en 1ère année…), parce que l’université peut proposer dans le cadre des « OUI SI » des parcours adaptés aux besoins différents des étudiants, parce qu’on a supprimé le tirage au sort, parce que le Bac reste la seule condition pour suivre des étude supérieures. Le Sgen-CFDT n’a pas validé la fiche Avenir qui fait la part belle aux notes et au classement des élèves. Parcoursup n’est pas plus juste ou injuste qu’APB, il rappelle que l’enseignement supérieur n’est pas démocratique et la loi ORE ne s’est pas attaqué à la reproduction des privilèges. C’est pourquoi le Sgen-CFDT exige que la nation consacre autant de moyens aux étudiants des filières universitaires qu’à ceux des CPGE, des écoles de commerce et autres particularités reproductrices de l’enseignement supérieur français.
Parcoursup et vacances scolaires : le dernier envoi de la plateforme Parcoursup demandant aux personnels de direction d’indiquer les 3 semaines de fermeture des EPLE est un déni du travail des personnels de direction et une méconnaissance du fonctionnement des EPLE. Le Sgen-CFDT ne se satisfait pas de l’allongement de cette période à 4 semaines. Il convient de reconnaitre de façon concrète et significative le travail supplémentaire effectué par les personnels de direction.
Les propositions formulées par le Sgen-CFDT pour cette année :
- Que le plus grand nombre de bâchelier·es soient affecté·es dans les formations d’enseignement supérieur demandées avant le 14 juillet ;
- Libérer d’obligations de jury et de correction d’examens et concours celles et ceux qui doivent traiter les dossiers de STS et CPGE arrivant début juillet dans les établissements ;
- Suspendre, dans les EPLE, la procédure Parcoursup du 20 juillet au 20 août ;
- Reprendre la procédure après le 20 août en fusionnant les affectations de la CAAES (Commission Académique d’Admission à l’Enseignement Supérieur) et de la phase complémentaire.
Les propositions formulées par le Sgen-CFDT pour l’an prochain :
- Faire un bilan partagé du déroulé de Parcoursup dès la fin de la phase complémentaire (en relation avec le comité éthique et scientifique de Parcoursup) ;
- Engager une véritable concertation pour faire évoluer Parcoursup en fonction de l’évaluation qui aura été effectuée ;
- Accélérer la procédure d’affectation des élèves ;
- Définir un calendrier qui prenne en compte la réalité des EPLE.
L’évaluation des agents dans le cadre du PPCR
Les inspecteurs et les personnels de direction n’ont pas bénéficié des formations nécessaires à une vraie évolution de l’évaluation.
L’accompagnement, axe majeur de la réforme de l’évaluation, semble avoir totalement été écarté des préoccupations des rectorats qui se sont concentrés exclusivement sur les procédures administratives.
Où est l’autonomie que nous promettait le ministre à son arrivée rue de Grenelle ?
Si un rapport concernant la gouvernance territoriale et la fusion des académies a été publié très rapidement au mois de mai dernier, aucune réflexion, à notre connaissance, n’a été ouverte sur l’autonomie des EPLE.
Pour le Sgen-CFDT, l’autonomie des EPLE repose sur des objectifs énoncés par l’échelon central et non des prescriptions qui se matérialisent par des programmes non-curriculaires, par le pouvoir d’agir donné aux équipes et par une évaluation des établissements et non des individus. L’autonomie, c’est pour l’établissement d’être en capacité de répondre aux spécificités des élèves accueillis, pas de recruter ses personnels et de mettre les établissements en concurrence.
Quelles avancées pour les personnels de direction ?
La DGRH s’est lancée, dans le cadre de l’agenda social, sur une réflexion concernant le recrutement des personnels de direction, leur formation et leur carrière.
Le Sgen-CFDT a exprimé son point de vue et formulé ses propositions :
- Un recrutement dont le principe repose sur la prise en compte du parcours professionnel et des compétences attendues d’un personnel de direction ; capacité au management pédagogique, aptitude à déléguer et à proposer une organisation démocratique de l’EPLE…
- Un rapprochement des corps d’encadrement pour favoriser les mobilités fonctionnelles entre direction et inspection d’une part, et au sein de la fonction publique d’autre part ;
- Une formation préalable à la prise de fonction. Une véritable formation continue tout au long de la vie ;
- Une évaluation s’appuyant sur un référentiel professionnel ;
- Une mobilité transparente fondée sur le profilage du poste ;
- Une reconnaissance des conditions de la pénibilité du travail pénible, une vraie DRH attachée à la prévention des RPS, un Compte Epargne Temps qui puisse réellement être alimenté, l’instauration de Groupes d’Analyses de la Pratique ;
- Une confiance dans tous les cadres intermédiaires qui se concrétise par une véritable autonomie du pilotage pédagogique des établissements.
Conclusion :
Pour le Sgen-CFDT, les directions prises par notre ministère ne nous semblent pas être les bonnes pour favoriser la réussite de tous les élèves et permettre plus de justice scolaire et sociale.
La méthode utilisée ne nous semble pas respectueuse du professionnalisme des cadres pédagogiques, inspecteurs et personnels de direction. Les personnels de direction sont assignés à des rôles d’opérateurs et les inspecteurs à des missions de contrôle.
Les personnels de direction assument toujours plus de charges sans pour autant avoir plus d’autonomie dans le pilotage pédagogique de leurs établissements.
Leurs conditions de travail ne font que se dégrader sans que soient reconnus leurs efforts au plus près des besoins des élèves et des préoccupations de leurs familles.
Nous vous souhaitons, à toutes et à tous, une excellente rentrée.