Après Conflans…

Un groupe de travail s’est tenu au rectorat de Versailles ce mardi 20 octobre 2020, réunissant les représentants syndicaux en vue à la fois de faire retour sur les faits survenus avant l’assassinat de notre collègue vendredi soir dernier, mais aussi de préparer la reprise après les congés.

Retour sur les faits et leur prise en compte avant l’innommable

La rectrice et la DASEN des Yvelines ont détaillé jour par jour les faits et le suivi, les actions menées par l’institution à tous les niveaux, et en premier lieu par la cheffe d’établissement. Ces éléments semblent attester d’une prise en compte sérieuse de la situation.

À ce stade, le rectorat n’a pas souhaité rendre publics ces détails au-delà de son communiqué de presse du 18 octobre. Il a été demandé aux représentants syndicaux de ne pas divulguer les éléments qu’ils ont reçus, compte tenu de l’enquête en cours. Nous le regrettons dans la mesure où une diffusion publique et transparente de ces différents éléments serait de nature à pouvoir poser les bonnes questions plutôt qu’à se disperser en faux procès, et à couper court à certaines rumeurs.

Logiquement, des investigations internes sont en cours, et nous avons reçu  l’assurance qu’elles seront complétées à moyen terme par celles du CHSCT académique (qui doit se réunir en novembre). Ces informations précises ne nous apporteront pas toutes les réponses, mais elles sont indispensables pour évaluer la pertinence et l’efficacité, ou la maladresse et la carence des interventions.

Les faits doivent surtout nous interroger sur l’insuffisance de réponses seulement internes à l’Éducation Nationale, sur des champs et des faits  qui la dépassent. Si plusieurs niveaux de la chaîne hiérarchique ont alerté les services de police et de justice, ils sont restés dans l’ignorance du détail des mesures effectivement prises pour assurer la protection des lieux et des personnes. Notre première impression est que chacune et chacun a essayé de faire son travail de son côté, sans mesurer forcément l’ampleur des tensions, attisées via les réseaux sociaux.  C’est cette absence de coopération suffisante qu’il faudra interroger, dans le respect des missions de chacun (enseignant, chef d’établissement, police, justice…).

sgen cfdt conflansNos demandes pour le 2 novembre et après

Les enjeux de la reprise après les congés se déclinent à la fois en terme de temps d’hommage dans les établissements, de temps pédagogiques et d’échanges autour des valeurs fondamentales, et aussi bien sûr en terme de sécurité dans et aux abords des établissements.

Voici les positions et les propositions que nous portons :

1/ À propos d’une minute de silence

Il est probable que cette modalité sera incontournable, d’autant qu’elle a de fait été annoncée par le ministre de l’Éducation nationale. Mais nous insistons pour qu’elle ne soit imposée à tous, sans discernement. Elle est d’abord  inadaptée pour certains âges. A l’école maternelle, un travail sur le respect des différences et de la parole de l’autre serait une action suffisante et positive.

Ensuite, si imposer une minute de silence conduisait (comme en 2015) à n’en surtout retenir que les rares incidents, nous aurons échoué.

Il faut laisser aux équipes et aux établissements une autonomie dans l’organisation, y compris en choisissant des modalités alternatives, et que l’hommage puisse prendre d’autres formes plus adaptées si les équipes le jugent nécessaires.

2/ Sur un temps de retour en équipes sur le lieu de travail

On ne peut pas imaginer reprendre lundi 2 novembre matin comme si de rien n’était. Un temps d’échange en équipe est indispensable dès la reprise, pour permettre à l’hommage de se passer dans de bonnes conditions et s’approprier la construction des réponses pédagogiques. Cela passe obligatoirement par un temps banalisé, mais le créneau et la durée peuvent varier selon le type d’établissement (école, collège, lycée) et les contraintes locales. Banaliser unilatéralement la matinée du lundi est tentant mais cela ne suffira pas à associer l’ensemble des enseignants pour une réponse pédagogique, et à la faire porter (pour les établissements du second degré) par l’ensemble des collègues et non par les seuls enseignants d’histoire-géographie et/ou ceux qui assurent l’EMC.

Ce temps banalisé ne doit pas se contenter de « débriefer » l’évènement, mais doit aussi tenir compte de la quinzaine de jours qui aura suivi, chargée en émotions et en polémiques. Nous appelons le ministère à en tenir compte dans les propositions qu’il ne manquera pas de faire. Notre institution est légitime et doit faire à ses enseignants des propositions, diffuser des pistes pédagogiques, partager de bonnes pratiques ou des documents pertinents. Mais là encore, il doit s’agir d’un éventail dont les équipes, et les enseignants dans leurs classes, pourront se saisir selon la réalité de la relation avec les élèves.

3/ Sur les relations avec les forces de police et avec la justice

Cette rentrée va poser des questions de sécurité, dans le secteur de Conflans mais pas seulement. Dans l’immédiat, les rectorats doivent identifier les établissements qui ont connu récemment des remous, en particulier liés aux questions de laïcité, afin de prêter une attention particulière aux conditions pédagogiques de la rentrée mais aussi aux conditions de sécurité.

A plus long terme, il faut engager le chantier des relations entre l’Education nationale et les administrations en charge de la sécurité. Nous ne demandons bien sûr pas que des policiers viennent dans les établissements, mais qu’un dialogue institutionnel et privilégié soit facilité, par exemple entre les chefs d’établissement et les responsables locaux de la police.

4/ Sur la place des parents

Les évènements témoignent de la réalité d’une défiance qui s’est installée entre l’école et certains parents d’élèves. Sans anticiper sur les demandes des fédérations de parents, nous devons les associer dans la réflexion à mener à moyen et long terme.

Il n’y a à notre sens rien à attendre en refusant de dialoguer avec les parents d’élèves. Cela n’empêche pas de tenir un discours ferme pour refuser les remises en cause inacceptables. Ce n’est pas parce qu’on entend la demande de certains parents qu’on la considère pour autant comme légitime, et encore moins qu’on soit prêt à y accéder.

Un nouveau groupe de travail devrait se tenir la semaine prochaine. Entre temps, nous espérons vivement que le Ministère aura communiqué ses positions (jeudi vraisemblablement) en prenant en compte les remontées de nos instances académiques (et des autres académies où des rencontres similaires se tiennent). Les personnels meurtris ont besoin de confiance et de souplesse, de temps et de latitudes pédagogiques, et non de consignes verticales et injonctives.

Lire le communiqué de presse du Sgen-CFDT Versailles le vendredi 16 octobre.

Lire le compte-rendu à l’issue de la rencontre des organisations syndicales avec le premier ministre et le ministre de l’Éducation nationale, le samedi 17 octobre.

Contacter les militantes et militants du Sgen-CFDT : c’est ici !

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