Conférence sur la souffrance au travail avec Marie PEZE

Qu’est-ce que le burn-out (épuisement professionnel) ?
En finir avec les a-priori, les stéréotypes et donner les vrais outils.

Le Sgen-CFDT Paris organise une conférence-débat avec Marie PEZE, docteure en psychologie, psychanalyste, ancien expert judiciaire et responsable du réseau Souffrance et Travail. Auteure de : Le burn out pour les nuls, First, 2017 ; Je suis debout bien que Blessée, Josette Lyon, 2015 ; Travailler à armes égales, Pearson, 2011 ; Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés, Pearson, 2010.

Date : 30 janvier 2018

Lieu : CFDT Ile-de-France, 78 rue de Crimée – Paris 19ème

Heure : de 18h à 20h

Places limitées : inscrivez-vous vite en remplissant le formulaire ici !

 

Burn-out, encore un anglicisme qui, comme beaucoup d’autres (bore out, burn in etc.), a envahi notre vocabulaire. Nous assistons à un abus de langage de la part des patients, tous en « burn out » comme à une époque, tous « harcelés ». Le syndrome d’origine se transforme en concept-poubelle, en pop psychologie, vidé de sa définition véritable.

Le burn-out est encore trop souvent renvoyé à des caractéristiques personnelles, surinvestissement du travail, terrain addictif, besoin excessif de reconnaissance, engluant le salarié dans sa culpabilité individuelle, exonérant les organisations du travail de leur obligation de préserver la santé des salariés (L 4121-1 à L 4121-5 du Code du travail). La conscience professionnelle, autrefois vertu majeure, est-elle devenue une pathologie ? Vouloir bien faire son travail en ayant le temps, les moyens, les objectifs relève-t-il d’un idéal névrotique ?

Le burn-out, la maladie du siècle ?

burn-out

Le burn-out est appréhendé comme un drame de l’insuffisance individuelle alors qu’il relève d’une pathologie sociale, voire de civilisation. Une frénésie s’est emparée de notre époque et donc aussi du monde du travail. Nous vivons clairement au-dessus de nos moyens individuels physiques et psychologiques, plus généralement au-dessus des moyens de notre planète Terre que nous épuisons aussi.

A ces difficultés se surajoute la question de l’imputabilité au travail, faisant de la reconnaissance du burn-out un parcours du combattant et pas toujours la meilleure solution pour un salarié trop atteint qui ne pourra pas retourner au travail. Pourquoi ne dit-on pas au patient que s’il est reconnu en maladie professionnelle par la caisse ATMP et qu’il ne peut pas retravailler, on ne pourra pas le mettre en invalidité pour le même diagnostic, au sein de l’assurance maladie ?

LES NOUVELLES ORGANISATIONS DU TRAVAIL

Aux principes du management scientifique, avec ses méthodes de surveillance, de contrôle et d’encadrement, couplés aux nouvelles technologies, se sont substitués de nombreux dispositifs qui, des chaînes de montage aux hôpitaux publics, par divers mécanismes, disciplinarisent les corps et les psychismes engagés dans le travail.

Chez nous à l’hôpital, c’est la mise en place de la tarification à l’acte, la mode de la chirurgie ambulatoire, des pôles, puis du Lean management, de la sous-traitance, du New Public Management… Les patients traités par le chirurgien deviennent un nombre d’actes, le temps passé par acte, la performance de l’opérateur par rapport aux autres. Le travail du chercheur devient le nombre d’articles écrits par an. L’infirmière croule sous la saisie de données et de reporting et ne consacre plus que 10 % de son temps à aux soins. Le patient est opéré en ambulatoire pour économiser les nuitées.

Le rythme du travail est devenu un voleur de vie.

Du côté du travail, celui qui réussit désormais n’est pas le plus intelligent ou le plus fort physiquement mais le plus rapide ! L’augmentation de la cadence des tâches à accomplir, leur densification, pulvérise tous les seuils neurophysiologiques et biomécaniques supportables.

souffrance au travailPremier dégât, l’envahissement, une porosité complète entre vie privée vie professionnelle : Les cadres, sinon tous les travailleurs, entre téléphone cellulaire, mails, ordinateur portable, ont parfois bien du mal à savoir s’ils « travaillent » ou ne travaillent pas, puisqu’il est de plus en plus fréquent qu’il y ait un coin bureau à la maison.

Deuxième dégât, un travail en mode dégradé : Quand on demande à des travailleurs de faire plus vite, avec moins de moyens et d’effectifs, ils ne peuvent pas bien travailler. Alors, Il faut mentir aux clients, faire des promesses au public tout en sachant très bien qu’on ne pourra pas les tenir, le mensonge est en quelque sorte organisé, avec quelquefois, par peur de perdre son travail, la collaboration de tous.

Troisième dégât, les pathologies de surcharge : L’organisme humain a des cycles, des alternances de veille et de sommeil, des pics de production de certaines hormones à certains moments… Si on soumet l’organisme à une intensification des tâches sur un temps trop prolongé, il fabrique des toxines, il doit mobiliser beaucoup de cortisol pour tenir, travailler en apnée. Le corps inoxydable, sans maladie, sans émotion, le « corps machine » que veut l’organisation du travail, n’existe pas. Les « athlètes de la quantité » font des burn-out, des infarctus, des AVC.

Des outils existent mais ne se diffusent pas facilement, prisonnier du tenir à tout prix tant la peur de perdre son travail est omniprésente.

  • Il faut réhabiliter la fatigue. La fatigue, avec son cortège de symptômes, dit des choses sur l’état de notre corps et constitue donc un mécanisme protecteur qui engage à ralentir ou à interrompre la dépense d’énergie La fatigue n’a qu’un but : conserver l’équilibre de la vie, nous permettre de vivre des intérêts sans toucher à notre capital santé.
  • Pour protéger sa santé au travail, il faut soigner sa peur. Surmonter sa peur, c’est connaître ses droits. Se défendre implique d’accomplir une démarche volontaire, adulte, de passer du statut de victime à celui de sujet de droit.
  • Il faut étudier votre organisation du travail et les techniques de management pathogènes afin de prendre de la distance, de ne pas tout vivre comme une attaque personnelle et de ne pas tout donner contre des gadgets de qualité de vie au travail, des salles de sport supposées entretenir votre endurance.
  • Aller voir le médecin du travail, en visite à la demande puisqu’il n’y a plus de visite régulière et tout lui dire afin que tout soit noté dans le dossier médical Ca peut servir quand il s’agit de prouver le lien avec le travail.

Et les femmes ?

Devoir s’adapter à un monde du travail construit par les hommes, impose de composer avec des horaires faits pour des hommes à qui des femmes épargnent le travail privé. De s’entendre rappeler son corps biologique de femme dans ses aléas, ou de s’entendre rappeler son corps de femme par un sexisme ordinaire qu’on taxe encore trop souvent de gauloiserie à la française.

Lire aussi
Site du réseau Souffrance et Travail.
Tous les articles de ce site classés du plus récent au plus ancien