La mise en place des Pôles Inclusifs d’Accompagnement Locaux (PIAL) et leur implantation sur tout le territoire ne se font pas dans la facilité. Trop souvent, le PIAL n’est qu’un outil technique de gestion du temps de travail des AESH. Pour le Sgen-CFDT, il doit prendre une autre dimension.
PIAL : Des objectifs initiaux intéressants
Depuis la rentrée 2019, les PIAL s’installent progressivement sur le territoire avec trois objectifs :
- permettre un accompagnement défini au plus près des besoins pour chaque élève en situation de handicap afin de développer son autonomie et de lui permettre d’acquérir les connaissances et les compétences du socle commun ;
- développer plus de réactivité et plus de flexibilité dans l’organisation de l’accompagnement humain dans les établissements scolaires et les écoles ;
- favoriser une professionnalisation des accompagnants et une amélioration de leurs conditions de travail.
Installé en fonction du territoire, le PIAL peut intervenir sur les écoles maternelles et élémentaires d’une circonscription du premier degré, un ou plusieurs établissement(s) secondaire(s), ou encore un collège et des écoles de son secteur. La plupart des PIAL existants sont ainsi inter degrés.
Pour le Sgen-CFDT, c’est bien un dispositif qui doit être au service de l’école inclusive.
Mais la mise en œuvre du PIAL ne répond pas à cette ambition
D’un outil conçu au départ pour améliorer la situation de l’inclusion des élèves et surtout créer une gestion humaine des personnels AESH, le PIAL est devenu un outil technique qui ne fait que gérer la pénurie de ces personnels sur le terrain. En effet, il ne fait que trop souvent uniquement de la gestion comptable du temps des AESH.
C’est sans doute lié à un pilotage trop pyramidal manquant cruellement de proximité. Ainsi, beaucoup d’AESH peuvent se retrouver devoir changer d’enfant à suivre du jour au lendemain sans aucune transition. La solution serait-elle pour autant de supprimer les PIAL comme certains le demandent ? Par quoi pourrait-il être remplacé ?
Pour le Sgen-CFDT, il est plus utile d’engager une évolution du dispositif afin de le rendre conforme aux objectifs initialement programmés.
Donner des moyens à la hauteur des missions exercées
Le PIAL doit d’abord disposer des moyens indispensables à son fonctionnement.
On ne peut confier le pilotage (IEN, personnels de direction), la coordination (directeur.trice d’école, DACS, CPE, coordo ULIS…) et la liaison (AESH référentes) du PIAL sans contrepartie.
Pour le Sgen-CFDT, la mission de pilotage est bien une fonction à part entière, qui doit se traduire par une indemnité dédiée.
Des moyens supplémentaires en décharges de service doivent également être accordés aux coordinateurs, afin de leur permettre de remplir ce travail essentiel.
De même, une reconnaissance plus conséquente – financière et en temps – est une condition indispensable au bon exercice des missions d’AESH référent. Les académies doivent mener une politique volontariste en la matière.
Si l’école inclusive est une priorité et si le PIAL en est une traduction, les personnels qui en assurent la gestion quotidienne doivent en obtenir la reconnaissance et avoir les moyens d’assurer leurs missions. Tous (pilotes, coordonnateurs, AESH référentes) doivent également bénéficier d’une formation pour assurer l’organisation courante de ce dispositif. Car cela dépasse très largement la seule gestion comptable des personnes ou des emplois du temps.
Un nécessaire travail de gestion des ressources humaines de proximité
Trop souvent, l’AESH à peine recruté.e est envoyé.e sur le terrain auprès d’un enfant en situation de handicap sans accompagnement, ni formation adéquate. La dimension humaine du PIAL doit évoluer pour sécuriser le parcours des AESH.
Pourquoi ne pas associer les AESH au choix de l’endroit où ils ou elles vont travailler ?
En effet, un.e AESH n’est actuellement qu’un nom dans une liste que l’on déplace au gré des besoins. A ce titre, il est essentiel d’assurer une gestion humaine adéquate – par exemple en sollicitant systématiquement l’avis de l’AESH lors d’un changement de son emploi du temps. Modifier le lieu d’exercice, l’enfant à accompagner, entraîne inévitablement des conséquences sur l’organisation et le travail de ces personnels dont la rémunération est très faible. En ce sens, l’AESH référent.e devrait avoir une place majeure dans le PIAL, pour permettre ce lien entre le terrain et les décisions qui seront prises pour les agents.
Faire du PIAL un outil d’analyse partagé
Le PIAL doit avant tout être pensé collectivement. Si chacun doit y trouver sa place, chacun devrait pouvoir être associé à la prise de décision. Tout comme l’inclusion scolaire ne saurait être portée par quelques uns, la mise en œuvre de la notification MDPH ne peut se faire que dans la concertation et l’implication de chacun.e.
De même, les adaptations, les choix d’intervention sur telle ou telle discipline doivent pouvoir donner lieu en amont et de façon régulière à des temps d’échanges en équipes pluriprofessionnelles. Analyser ensemble les réussites des élèves en situation de handicap, c’est leur donner demain les moyens d’acquérir une plus grande autonomie. C’est aussi permettre à chaque membre du PIAL de partager ses difficultés, ses réussites et d’œuvrer collectivement, pédagogiquement à l’inclusion scolaire. C’est enfin pouvoir se former ensemble à la problématique du handicap grâce à de possibles apports extérieurs.
Faciliter la gestion des remplacements
Le PIAL doit également devenir un outil plus pédagogique permettant un meilleur accompagnement de l’enfant en situation de handicap. En effet, aujourd’hui, lorsqu’un.e AESH est absent.e, on tend à diminuer la notification horaire de l’enfant en répartissant le temps de travail des AESH present.es sur d’autres enfants suivis.
Certains enfants, qui devraient alors bénéficier de 15 heures de présence de l’AESH, se retrouvent à ne bénéficier que de 10 h d’accompagnement. Il est donc désormais nécessaire que le PIAL puisse disposer d’une réserve de remplaçant.es AESH pour subvenir à ces besoins. Un premier pas pour permettre non seulement de sécuriser l’ensemble des personnels, mais aussi et surtout de gagner en qualité et en réactivité.
Mieux faire connaitre le PIAL
Trop souvent, pour l’ensemble de la communauté éducative, le PIAL est un dispositif abstrait dont on distingue difficilement les contours.
Pour le Sgen-CFDT, le PIAL doit être systématiquement présenté à l’ensemble des AESH et des enseignant.es.
Une réunion systématique en début d’année scolaire paraît essentielle pour à la fois préciser l’organisation choisie mais aussi répondre aux différentes interrogations autour de ce dispositif. Apporter des réponses permet de gagner du temps et de travailler ensuite avec une plus grande sérénité. Cette réunion doit également permettre de préciser les rôles de chacun, coordonnateurs et référents AESH.
Les parents et partenaires extérieurs devraient également bénéficier d’une information sur ce dispositif afin de mieux en connaître l’organisation et les missions. Un effort de transparence est nécessaire pour l’instauration d’une confiance mutuelle et partagée.
Une ambition qu’il faut désormais traduire en actes
L’ambition initiale du PIAL n’a pas encore pu réellement se traduire en actes.
Plusieurs facteurs en sont la cause :
- La crise sanitaire n’a pas permis aux pilotes, aux acteurs de pouvoir consacrer le temps nécessaire à sa mise en place.
- L’institution finit par épuiser les personnels et provoquer des dysfonctionnements prévisibles en donnant plus de missions à ceux qui en ont déjà beaucoup.
- L’Éducation nationale n’a pas engagé les moyens humains nécessaires à ses ambitions : AESH en nombre suffisant, reconnaissance des pilotes, temps pour les coordonnateurs, les référents.
Pour le Sgen-CFDT, il est donc urgent de prendre toutes les mesures pour faire du PIAL un véritable outil humain, pédagogique au service de l’inclusion scolaire et du parcours des élèves en situation de handicap. Les acteurs, eux, sont prêts.
L’Éducation nationale se doit donc de faire le nécessaire pour permettre une évolution du dispositif PIAL en ce sens. Cela doit sans doute passer par la création d’un Observatoire de leur fonctionnement. Cette nouvelle instance pourrait être nationale mais aussi se traduire par des déclinaisons locales. Observer, repérer les bonnes pratiques en associant l’ensemble des acteurs peut déboucher sur des propositions d’évolutions allant dans le bons sens pour le Sgen-CFDT.
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