Reprises : où en est-on ?

L’annonce des reprises des établissements scolaires le 11 mai a mis l’ensemble des acteurs, actrices et partenaires de l’Ecole sous tension.
Quelques jours après la réouverture, nous vous proposons un point sur la situation et tentons d’apporter des réponses aux questions que beaucoup se posent.

 

Pour vous accompagner, vous informer, mais aussi recueillir votre parole sur les reprises, le Sgen-CFDT de l’académie de Créteil a mis en place une application très simple à utiliser.
Vous pouvez la retrouver
ici
Par ailleurs, n’hésitez pas à nous faire part de vos questions ou des dysfonctionnements que vous constatez.
En effet, nous échangeons régulièrement avec l’administration pour signaler les situations problématiques pour les personnels.

reprises
Chacun·e d’entre nous, quelle que soit sa place dans l’Éducation Nationale, est bien conscient·e de la responsabilité sanitaire et sociale qui pèse sur l’École dans son ensemble.
Celle-ci peut, par bien des aspects, s’avérer écrasante dans la période.
Mais elle renforce et élargit aussi le sens de nos missions.

Des reprises partielles

On le voit, les reprises ne peuvent être que très partielles, adaptées aux exigences sanitaires du moment et aux différences entre les territoires.

Le respect des protocoles a des implications différentes selon les services.

Dans les services administratifs le public n’est pas accueilli. Comme le télétravail est largement conseillé, l’organisation dans les locaux et la présence gel et de masques doivent permettre des conditions de travail propres à éviter la contagion.

Dans le 1er degré aujourd’hui et dans le 2nd degré désormais, le respect des protocoles implique que seule une petite partie des élèves peut être accueillie en même temps.

Sur cette première semaine ce sont, de l’aveu même du Ministre, moins de 10% des élèves qui auront repris le chemin de l’école. Même en imaginant une montée en puissance, ce nombre ne pourra dépasser les 25-30% en respectant les protocoles.

Pendant ce temps la grande majorité des élèves reste à la maison. C’est un défi majeur pour l’Éducation Nationale, mais aussi pour l’ensemble de la société, défi qui se prolongera sans doute à la rentrée 2020.

un défi majeur qui se prolongera sans doute à la rentrée 2020

Des protocoles non négociables, quel que soit le type de service et de personnel

Le respect des protocoles n’est pas négociable. C’est un impératif sanitaire.

Notre institution a eu beaucoup l’habitude ces dernières années de composer comme elle peut avec des injonctions 

  • parfois contradictoires,
  • parfois incohérentes,
  • parfois non-applicables.

Le caractère non-négociable du protocole rompt avec nos us et coutumes et vient bousculer nos modes d’action et de réflexion. Cela s’explique notamment par le fait que l’anticipation est devenue pour le moins complexe voire impossible.

Pourtant cela doit être clair partout : si le protocole ne peut pas être appliqué, alors il ne faut pas ouvrir.

si le protocole ne peut pas être appliqué, alors il ne faut pas ouvrir

Présentiel et/ou distanciel ?

La question de la présence ou non en établissement des personnels est régulièrement posée.

Si les consignes ministérielles et interministérielles semblent avoir été claires, celles-ci n’ont pas toujours été bien comprises ou appliquées par les hiérarchies intermédiaires

L’infographie ci-dessous permet d’y voir plus clair sur la situation jusqu’au 2 juin.

reprises

L’articulation présentiel/distanciel est un sujet d’interrogation majeur dans la période.

Sur le terrain, là où la réouverture a été possible dans le 1er degré, une majorité des personnels est nécessaire pour accueillir une minorité des élèves.
Cela pose très fortement la question de la continuité pédagogique pour celles et ceux qui ne peuvent être accueilli·e·s.

Pour le Sgen-CFDT une chose est claire : il ne peut être demandé aux personnels d’assurer présentiel ET distanciel.

il ne peut être demandé aux personnels d’assurer présentiel ET distanciel

Dans les services déconcentrés, la règle est de privilégier le travail à distance quand cela est possible.

Il est impératif de s’appuyer sur les personnels, leurs envies, leurs possibilités, leurs craintes aussi, pour concevoir l’articulation entre présentiel et distanciel et plus largement une organisation du travail qui convienne à tou.te.s.

Construire collectivement l’organisation du travail pour les reprises

Cette organisation du travail doit s’inscrire dans un cadre commun

  • discuté avec l’ensemble des partenaires des établissements, via notamment les instances adéquates (Conseils d’école, CA, CHS),
  • qui intègre les questions
    • de la charge de travail,
    • des temps de concertation
    • mais aussi de l’équipement nécessaire aux activités distancielles.

Dès que cela est possible, le distanciel doit être privilégié pour la tenue des instances.

le distanciel doit être privilégié pour la tenue des instances

Il est par ailleurs nécessaire

  • d’organiser une reprise graduée, mesurée, adaptée à la charge de travail des agents d’entretien.,
  • de prévoir des temps de retour d’expérience pour adapter le protocole de reprise d’activité aux réalités du terrain,
  • et de prendre pleinement en compte la parole des usagers (élèves, parents).

Enfin, l’utilisation du registre santé et sécurité au travail est un droit et une procédure plus que jamais indispensable pour tous les usagers. C’est ainsi que nous pourons ensemble prendre soin de notre santé.

Dans le 1er degré : entre tension et créativité

Dans le 1er degré de nombreuses écoles ont rouvert dans l’académie. D’autres n’ont pas pu rouvrir.

Pour la CFDT, il n’était pas logique de rouvrir des écoles dans des départements classés rouge où la situation sanitaire reste critique, alors que le même argument était utilisé pour ne pas rouvrir les collèges.
Nous n’avons malheureusement pas été entendus. Ceci peut conduire à des absurdités sur le terrain.

Le passage, parfois, d’un accueil de soignants non régi par un protocole aussi strict à une réouverture sous protocole peut ainsi être très difficile.  Le cadre sanitaire, imposé et nécessaire, ne peut être pleinement satisfaisant pour personne.

Il aurait été sans doute plus responsable d’indiquer dès le départ ce que l’école peut proposer actuellement : avant tout un accueil davantage qu’une école, au sens où on l’entend traditionnellement.

ce que l’école peut proposer actuellement c’est avant tout un accueil

Impact psychologique

On peut s’interroger sur l’impact psychologique que pourra avoir cet accueil sur les enfants et les personnels. En effet, les règles sanitaires qui doivent s’imposer pour la santé des élèves et des personnels sont parfois difficilement compatibles avec la bienveillance habituelle entre les enseignant.e.s et leurs élèves. D’autant plus qu’elles ne sont pas forcément comprises par les élèves et difficilement applicables pour les plus jeunes.

les règles sanitaires ne sont pas forcément comprises par les élèves et difficilement applicables pour les plus jeunes.

Les parents d’élèves, eux-mêmes, ne comprennent pas toujours cette reprise alors même que

  • le conseil scientifique conseillait d’attendre septembre
  • et le ministère préconise dans un premier temps le volontariat.

Il est nécessaire de prendre en compte que le temps écoulé du confinement, cette crise sanitaire que nous traversons, affecte profondément chacun. D’autant plus dans les zones rouges où l’impact de la crise est important.

cette crise sanitaire affecte profondément chacun

Ne négligeons donc pas l’aspect humain : des élèves, des parents, des personnels, comme tant d’autres personnes, malheureusement, ont été affectés par cette crise.

Des pressions et pas assez de temps

Cette reprise, alors que la crise sanitaire est encore loin d’être derrière nous, place dès lors une très forte pression sur l’ensemble du système. Dans ce cadre, les injonctions et les pressions ne peuvent être que contre-productives et dangereuses, surtout quand elles sont contradictoires. Les conseils pédagogiques donnés aux enseignants pour aborder cette reprise ont ainsi pu quelquefois aller à l’encontre du protocole sanitaire.

Les injonctions et les pressions ne peuvent être que contre-productives et dangereuses, surtout quand elles sont contradictoires.

A partir du 11 mai les enseignant.e.s ont dû à la fois mettre en place le protocole sanitaire et se former pour pouvoir l’appliquer. Un jour de plus a été accordé pour cette pré-rentrée.  Mais force est de constater que deux jours pour mettre en place cette reprise n’était pas un temps suffisant.
Nous ne pouvons donc que regretter que la demande du Sgen-CFDT d’une semaine pleine de pré-rentrée n’ait pas non plus été entendue.

Dans notre académie cohabitent aujourd’hui des situations très différentes.

Les possibilités restent inégales en fonction des territoires que ce soit en moyens humains ou  matériels permettant de gérer la crise au mieux en suivant le protocole.
Des situations sont localement très tendues là où d’autres territoires parviennent davantage à s’adapter à la situation. Mais rien ne permet aujourd’hui d’affirmer que les élèves qui ont pu reprendre le chemin de l’École cette semaine sont celles et ceux qui en ont le plus besoin.

Ce n’est que par le travail collectif, le respect de l’expertise de chacun·e, et la coopération (entre les acteurs et actrices de l’Éducation Nationale et celles et ceux des services municipaux) que des solutions peuvent être trouvées.

Les personnels ont souvent fait preuve de beaucoup de créativité, de compétence et de responsabilité pour arriver à faire ce qu’ils font le mieux : accueillir et prendre soin des élèves. Pour la société cela peut déjà être beaucoup.

Les personnels ont souvent fait preuve de beaucoup de créativité, de compétence et de responsabilité pour arriver à faire ce qu’ils font le mieux

Dans le 2nd degré : l’urgent c’est d’attendre

Notre académie étant en zone rouge, il a par contre été décidé de ne pas rouvrir les collèges dans un premier temps.
Les lycées restent quant à eux fermés à l’échelle nationale.
Ce n’est que fin mai, en fonction des indicateurs sanitaires, que nous en saurons si une reprise pour début juin, sans doute le 2, est envisageable, à la fois pour les collèges et les lycées.
Prévoir une reprise, agir comme si elle allait forcément avoir lieu, c’est sans doute s’avancer énormément.

Situations difficiles

Cette situation d’attente est difficile pour tou·te·s : pour nous, personnels de l’Éducation Nationale, mais aussi pour nos élèves et leurs parents. Il peut être tentant de chercher à combler le vide en planifiant au maximum.

Attention toutefois : la mise sous pression des personnels, dans une période où c’est l’ensemble de la société qui est en situation de fragilité, ne peut que mener à des situations difficiles.

la mise sous pression des personnels ne peut que mener à des situations difficiles.

Redisons-le : nul·le n’était préparé·e à vivre un confinement et à assurer une continuité pédagogique. Sans compter que le COVID s’est invité dans beaucoup de foyers et que déconfinement ne signifie pas retour à la normale.

Personnels de direction

Le Sgen-CFDT de l’académie de Créteil a demandé au Recteur que les personnels et notamment les personnels de direction, soient mieux accompagnés.

Cela pourrait se faire à l’instar du fonctionnement d’autres académies qui ont travaillé sur des mémo-processus : de véritables outils d’aide

  • à la mise en place d’un potentiel retour,
  • sur l’organisation spatiale et pédagogique, l’accompagnement des enseignants, des élèves ainsi que leurs familles.

Rien de normatif en soit, mais une garantie de cohérence et de plus de sérénité et de sécurité sur notre territoire.

Mieux accompagner les personnels de direction, c’est aussi permettre une meilleurs prise en charge des enseignants, des CPE, des agents, des élèves et des familles afin que personne ne revienne dans son établissement la boule au ventre.

Mieux accompagner les personnels de direction, c’est permettre que personne ne revienne dans son établissement la boule au ventre.

Réunions et instances

Certains dispositifs, par exemple des réunions plénières en présentiel avec l’ensemble des personnels d’un établissement, sont à éviter. Ils ne peuvent pas correspondre aux exigences du moment en termes sanitaires.
C’est d’ailleurs une décision qui a été prise par la Rectrice de l’académie de Versailles.
De même les instances dont la tenue est nécessaire avant la réouverture doivent, dès que cela est possible, se tenir en distanciel.

éviter les réunions en présentiel, tenir en distanciel les instances nécessaires

Prendre le temps

Enfin, ne pourrions-nous pas justement, pour une fois, prendre le temps ? Le temps :

  • de parler des conséquences du confinement et de la continuité pédagogique sur nos pratiques et nos santés,
  • de mutualiser les questions sur la vie en collectivité de demain,
  • d’échanger sur nos envies, nos besoins, nos craintes.

Parler, mutualiser, échanger

Parce que quand les collèges et les lycées rouvriront, on y fera quoi ? Sans doute pas ce que nous faisions avant le 13 mars…

Le temps aussi d’assurer toutes les tâches essentielles au suivi des élèves : orientation, accompagnement etc. Des missions sur lesquelles les personnels sont déjà concentrés et qui vont s’intensifier avec l’arrivée de la fin de l’année.

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