Seine-Saint-Denis et éducation

Lors de la rencontre de Laurent Berger avec les adhérents CFDT de Seine-Saint-Denis, Florent Ternisien a présenté ce que ce département a de particulier dans le domaine de l'éducation. Florent est Secrétaire Général du Sgen-CFDT de l'académie de Créteil.

Bonjour à toutes et à tous.

On a choisi ce matin, plutôt que de vous parler de nous au Sgen (mais on va bien finir par y arriver),  de vous parler du département et de ce qu’il a de particulier dans le domaine de l’éducation.

C’est un département qui est marqué par un paradoxe parce que d’un côté il concentre des difficultés sociales mais de l’autre, si on écoute les médias on a l’impression qu’il n’est pas si mal servi que cela en matière d’éducation :
■ il y a l’éducation prioritaire,
■ il y a eu beaucoup de créations de postes ces dernières années… Désormais on va avoir des suppressions,
■ et pour nous qui travaillons sur l’académie de Créteil – qui comporte trois départements – sur certains points le 93 est mieux doté que les autres départements.

Et pourtant on a l’impression que les problèmes sont parfois plus forts qu’ailleurs, plus difficiles… Que les situations sont plus compliquées.

◄ C’est lié à la concentration des difficultés sociales
◄ C’est lié parfois aussi à la proximité avec Paris, y compris médiatique qui fait qu’il est facile pour un journaliste de se déplacer dans le 93…
◄ Et puis surtout si il y a bien une réalité, c’est que le 93 n’est pas forcément moins servi en matière d’éducation que les autres mais – notamment en raison de son image – il est servi en dernier.

3 exemples pour y voir plus clair et pour vous expliquer les problèmes

Premier degré

Dans le premier degré, il y a quelques années, donc pour les professeurs des écoles, il y avait un gros manque d’enseignants et une démographie galopante puisqu’on est dans un département jeune dans lequel effectivement la natalité est forte…

Alors le gouvernement précédent a répondu par une injonction de postes massive avec un concours supplémentaire spécial qui a été créé pour l’académie de Créteil et particulièrement pour le 93.

Mais le niveau des concours de l’académie de Créteil n’est pas le même que celui de toute la France et les élèves du 93 se retrouvent face à beaucoup plus de personnels inexpérimentés que ceux des autres départements de l’académie et encore plus du reste de la France.

Alors on pourrait dire qu’on peut réussir à résoudre tout cela par la formation… Le souci c’est que :
■ la formation initiale est débordée par le nombre de stagiaires
■ la formation continue fait face au manque de remplaçants puisqu’on manque de personnels. ➜ Résultat : elle est quasiment famélique.

Au total, ce n’est pas la même qualité de service publique qu’ailleurs.

Second degré

Dans le second degré, le problème est différent : il y a un concours national, normalement tout se passe bien, il y a des enseignants en Seine-Saint-Denis et ils sont de qualité.

Ils sont certes un peu plus jeunes, un peu plus inexpérimentés qu’ailleurs mais ils compensent largement par leur dynamisme.

Sauf que quand ça commence à mal aller, ça devient plus compliqué : dans certaines disciplines on peine à faire le plein dans les concours de recrutement et ainsi par exemple en mathématiques c’est 200 postes d’enseignants de mathématiques qui sont vacants dans le 93. Dans le 77 et dans le 94, les chiffres sont assez simples, c’est zéro.

Quand on vous dit que le 93 est servi en dernier, voilà ce qui se passe.

Alors, je vous rassure : il y a quelqu’un devant les élèves, je ne sais pas si ça vous rassure beaucoup… On s’arrange parce que le rectorat fait un gros travail pour qu’il y ait toujours quelqu’un devant les élèves sauf que ce sont des personnels qui sont contractuels, qui sont précaires, qui sont peu formés et qui sont soumis effectivement à des changements réguliers.

Là encore, on n’a pas la même qualité de service public qu’ailleurs.

CROUS

Et puis enfin un troisième exemple parce qu’on est un Syndicat Général de l’Education Nationale et qu’on cherche à parler à toutes les catégories : c’est celui des CROUS.

Il y a pas mal de militantes et militants des CROUS présents et présentes ici dans la salle : même chose, l’Ile de France c’est une population jeune, il y a énormément d’étudiants.

Pour les CROUS , ça veut donc dire une grosse pression.

L’académie de Créteil, c’est 22 résidences universitaires, 4 500 lits, 3 millions de repas servis par an.
C’est 125 fonctionnaires mais c’est aussi 270 personnels ouvriers qui – eux – sont des contractuels en CDI.
On est sur un service public qui est assuré en majorité par des personnels qui ne sont pas fonctionnaires.

Heureusement on agit pour cela et on a signé un protocole d’accord pour la fonctionnarisation des personnels donc on y croit.

Mais il y a aussi des difficultés, des personnels extrêmement précaires : à l’université Paris 8 de Saint-Denis au CROUS vous avez ainsi 14 vacataires qui sont en fait des étudiants.
Ils assurent la plonge en même temps qu’ils font leurs études, avec toutes les difficultés liées
– au statut de précaire
– et à l’Etat, je n’apprendrai rien à qui que ce soit ici, qui n’est pas le meilleur des payeurs.

Mais aussi

Ce constat d’un service public qui n’est pas forcément le même qu’ailleurs, qui est plus sous pression, qui n’est pas forcément aussi bien servi, ça vaut aussi pour les services administratifs, ça vaut aussi pour les Centre d’Information et d’Orientation qui reçoivent beaucoup plus de visiteurs que dans d’autres départements. Ce constat, il est fait dans le rapport Kokouendo/Cornut-Gentille qui sera présenté demain dans cette même salle.

Et pour les personnels, ça veut dire qu’on leur demande d’aller exercer loin de chez eux, dans des situations difficiles, sans soutien adéquat et avec des rémunérations qui couvrent à peine le surcoût lié à la vie en Île-de-France et la difficulté à trouver un logement.

Pourquoi voter Sgen-CFDT ?

Alors pourquoi voter Sgen-CFDT dans ce cas-là, pourquoi voter pour la CFDT ?

■ Ben parce que déjà on est quasiment le seul syndicat qui est opposé à ce principe qui fait que les territoires défavorisés sont choisis en dernier. On est les seuls à dire que ce n’est pas normal que les personnels les moins expérimentés et les moins formés soient affectés en dernier.

■ Aussi parce qu’on est un syndicat qui revendique une amélioration des débuts de carrière, pris dans leur totalité.
Grâce à la CFDT, c’est une approche globale qui inclut le logement, les transports, la culture que l’on porte
➜ Voilà, il aurait été plus confortable sans doute, comme beaucoup de nos camarades syndicaux l’ont fait, de défendre les droits des plus anciens de ceux qui sont là depuis quelques années, et donc au final de défendre les territoires les plus favorisés… Ce n’est pas le choix qu’on a fait et on en est fier c’est pour ça qu’on est là.

Et nous aussi on veut dire que « nous sommes une richesse ».