Le Sgen-CFDT de l'académie de Créteil adresse une lettre ouverte aux candidat·e·s aux élections législatives dans les circonscriptions de la Seine-et-Marne, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
La lettre ouverte et les questions à télécharger
Une pénurie de personnels dans l’Éducation Nationale qui fait enfin la Une ?
Depuis plusieurs semaines, un grand nombre d’articles de presse et de reportage ont titré sur le faible nombre de candidat·e·s et d’admissibles aux concours de l’enseignement. Cette pénurie touche aussi l’académie de Créteil, où le CPRE, qui recrute les professeur·e·s des écoles, ne compte que 521 admissibles pour 1079 postes offerts. Dans le second degré la situation est tout aussi inquiétante puisque dans de nombreuses disciplines il y a également moins de candidat·e·s que de postes offerts.
Les médias ont également relayé l’initiative singulière prise par le rectorat de Versailles, rejoint depuis par ceux d’Amiens et de Toulouse, pour trouver des enseignant·e·s (mais aussi bien d’autres personnels) : des journées de recrutements massifs de contractuel·le·s sous forme de « job datings », qui se déroulent ces jours-ci. Ces journées posent de nombreuses questions tant sur les procédures de recrutement que sur la formation, l’accompagnement et la rémunération des personnels recrutés. Elles interrogent enfin la considération de nos métiers et les différences de statuts qui se multiplient entre les personnels.
Le manque de « profs » et ses conséquences sont donc devenu·e·s enfin un sujet quelque peu digne d’intérêt.
Nous, militantes et militants syndicaux, tirons déjà la sonnette d’alarme depuis de longues années. Aujourd’hui, l’institution n’a d’autre choix que de reconnaître la situation dramatique dans laquelle se trouve déjà notre service public d’éducation, particulièrement en Ile-de-France.
Notre ministère met en avant la réforme de la mastérisation, soit le décalage du concours à Bac +5 cette année, pour expliquer le « mauvais rendement » des concours. D’une part cet élément conjoncturel pouvait être aisément anticipé. D’autre part, il ne vient qu’aggraver le déficit structurel d’attractivité des professions de l’Éducation Nationale.
Nos métiers ne sont plus attractifs, particulièrement dans notre région, dans notre académie. Désormais, moins nombreux sont celles et ceux qui veulent les exercer. Plus nombreux celles et ceux qui veulent les quitter. Représentant·e·s des personnels, nous sommes bien placé·e·s pour savoir combien de nos collègues entreprennent des démarches pour obtenir une disponibilité, recourir à une rupture conventionnelle ou pour démissionner…
Les causes de ce manque d’attractivité sont connues :
- La faiblesse des salaires relativement au niveau de qualification requis est une cause majeure, tout particulièrement en Ile-de-France. La perte de pouvoir d’achat des enseignant·e·s depuis le début des années 1980, et son aggravation récente, est très bien documentée, notamment par les travaux de Bernard Schwengler.
- Parallèlement les tâches se sont intensifiées et multipliées. Là encore, les études – d’ailleurs commandées par le ministère lui-même – montrent bien qu’un·e enseignant·e ne travaille pas 15, ou 18 ou 24 heures hebdomadaires ! Sur l’année, les personnels de l’Éducation Nationale ont un temps de travail supérieur à la moyenne des travailleur·se·s français·es, à rebours des clichés… Quant à la charge mentale et émotionnelle, elle se quantifie difficilement.
- A cela, il faut ajouter encore ajouter un pilotage vertical et injonctif que la crise sanitaire a porté à son paroxysme, les réformes laissant de moins en moins d’autonomie ou de créativité aux enseignant·e·s . Au fil des programmes et des réformes, la satisfaction intellectuelle et le sens même du travail se perdent ou risquent de se perdre.
- Enfin, et c’est un vaste sujet, il y a aussi nécessité pour notre société de clarifier ce qu’elle attend de l’École et de celles et ceux qui en ont la charge.
Au Sgen-CFDT, nous avons la conviction qu’enseigner est un métier qui s’apprend, et non une vocation sacrificielle. Les professionnels de l’Éducation doivent être reconnu·e·s, à tous les sens du terme. Et c’est bien là que le bât blesse.
Les conséquences de la pénurie de professionnels sont multiples :
- des postes restent longuement vacants, les remplacements ne sont pas assurés. Combien d’heures de classe dues aux élèves ne sont pas assurées, des mois durant ? Nous tenons à votre disposition quantité d’exemples précis et édifiants.
- le suivi de l’assiduité, l’accompagnement médico-social, l’orientation des élèves pâtissent aussi du manque de personnels, en particulier dans les territoires où se concentrent les difficultés sociales, parfois aussi dans des territoires plus ruraux des marges de l’académie.
- pour les personnels en place, ce sont des surcharges de travail, pour absorber des heures et des tâches supplémentaires, prendre en charge davantage d’élèves, alors même que de véritables politiques de prévention pour la santé au travail et de prise en compte des risques psycho-sociaux peinent à se mettre en place dans nos écoles et établissements.
- pour les personnels toujours, cette situation de grande tension entraine aussi des difficultés pour obtenir un temps partiel, un détachement, parfois même un aménagement d’emploi du temps pour des raisons médicales ou encore suivre une formation !
A vous qui présentez votre candidature et souhaitez être élu·e ou réélu·e à l’Assemblée Nationale, nous vous interrogeons sur les positions que vous comptez y porter et vous adressons ces quelques questions précises :
Face à l’urgence de la situation, le recours plus massif à des contractuel·le·s ne peut plus être évité, mais ne peut pas constituer un horizon de long terme :
1. Quelles positions comptez-vous porter pour permettre un rattrapage salarial et plus largement une revalorisation de nos métiers ?
2. Pensez-vous que la contractualisation est une « voie d’avenir » en ce qui concerne l’Éducation Nationale ?
3. La représentation nationale doit-elle faire évoluer les règles de recrutement et de titularisation dans la Fonction Publique ?
4. Pensez-vous qu’il faille mettre en œuvre des mesures spécifiques conséquentes pour les personnels affecté·e·s en Ile-de-France ?
5. Comment comptez-vous vous investir sur les dossiers de l’éducation et de la jeunesse dans votre circonscription ?
Nous nous tenons à votre disposition pour apporter davantage d’éléments et échanger.Nous nous engageons à publier les réponses qui nous parviendront.